vendredi 13 novembre 2009

Comme les grands // Like the big guys

(English version below)

Il y a toujours des grands que l’on regarde et qui appartiennent à un autre monde. Quand j’étais à la maternelle, je jouais avec mes potes sur les coussins dans un coin de la pièce pendant que madame la maîtresse s’occupait des grands : les CP. Je ne sais pas comment elle s’en sortait avec plusieurs classes à la fois, mais c’était comme ça que ça se passait dans cette petite école du village d’Afa, en Corse. Quand je suis passé au CP, j’ai quitté les coussins pour m’asseoir sur les bancs. Je me souviens encore du premier livre que j’ai lu en entier : Yakari au pays des loups. C’était l’exploit du siècle. Et à ce moment-là, les grands, c’était les CE1. Les CM2, pour moi c’étaient déjà des adultes.

En ce moment mes soirées et jours de libres sont occupés par l’activité follement excitante du montage. Tous les musiciens que j’ai enregistrés sont maintenant des dizaines de pistes à découper pour en ressortir le meilleur, et je ne peux pas y couper, ça prends du temps. Alors pour survivre je rêve au concert de vernissage, et aux concerts qui suivront quand le CD sera sorti. Pour cela j’aime bien voir comment ça se passe chez les « vrais », dans la cour des grands. Je n’ai pas trop l’habitude d’aller à des concerts, dans la famille on n’avait pas trop les moyens, et ça peut vite être cher. Mais depuis quelques temps je m’y mets un peu, autant pour le plaisir que pour apprendre : Comment ces artistes commencent-ils un concert ? Quelle mise en scène ? Que disent-ils entre les chansons ? Qu’est-ce qui, dans un concert, en fait (ou pas) une expérience inoubliable ?

Avant-hier soir je suis allé voir Cesaria Evora en concert. C’est une très petite grande dame, une grand-mère qui doit s’accrocher au bras de quelqu’un pour aller sur la scène. Une Reine-Mère Noire qui vient visiter ses sujets avec les pieds nus. Elle était entourée de 8 musiciens extraordinaires qui ont enchaîné les titres avec un enthousiasme simple et communicatif. La salle était bondée, et sa voix remplie de soleil a fait danser les cœurs et les corps. Voilà un peu de sa musique:

J’essaie de comprendre pourquoi j’ai voulu aller la voir, et ce qui m’a plu :
- Je la connais déjà par ses CD et j’aime sa musique
- J’aime sa personnalité, une dame qui a galéré puis qui s’en est sortie et partage la musique joyeuse et nostalgique de son pays. Elle ressemble à une bienveillante grand-mère.
- Sur scène j’ai aimé la complicité des musiciens, leur sourire et le plaisir qu’ils mettaient à jouer. Des musiciens qui jouent sans plaisir m’enlèvent le plaisir de leur musique.
- Les quelques éléments de mise en scène (le violoniste et le saxophoniste qui enchaînaient des danses derrière…). Je vois qu’ils y ont travaillé, et je me suis senti honoré de ce qu’ils ont voulu nous donner cela en plus.

Et vous ?
- Qu’est-ce que vous cherchez dans un concert ?
- Qu’est-ce qu’il y a de plus dans un concert que dans un CD ?
- Qu’est-ce qui fait un « bon » concert ?

Je vous attends pour en discuter dans les commentaires… :)



There are always older ones we look at and who belong to another world. When I was in kindergarten, I used to play with my friends on the cushions in a corner of the room while the teacher took care of the “big guys” – the 1st grade. I don’t know how she managed to deal with several classes at the same time, but this is how things were in this small school of Afa, my village in Corsica. When I went in 1st grade, I left the cushions to sit on the bench. I still remember the first book I read in its entirety: Yakari in The Land of Wolves. It was the biggest event of the century. The “big guys” where the 2nd grade, and 5th grade guys where already adults to me.

Currently my evenings and free days are dedicated to the terribly exciting activity of tracks editing. All the musicians I recorded are now reduced to tons of tracks I have to edit to retrieve the best of it. I can’t escape, it takes time. So in order to survive I dream about the first concert I will do when the CD is released, and the concerts that will follow. And for this I like to study how it happens with the “big guys”, with renown artists. I am not really used to go and see concerts, with my family we had not a lot of money, and it can be very expensive depending on who you want to see. But lately I tried to go to concerts, both for my pleasure and to learn: how do these artists begin a concert? How do they behave on stage? What do they say in between songs? What makes of a concert an unforgettable experience (or not)?

On Wednesday I went to see a concert of Cesaria Evora. It is a very little great woman, a grandmother who needs to hold on to someone’s arm to reach the stage. She’s a Black Queen Mother who visits her subjects with bare feet. She was surrounded by 8 extraordinary musicians who played songs with enthusiasm. The hall was full, and her voice full of sun made hearts and bodies dance. Here's a bit of her music:

I try to understand why I went to see her, and what I liked :
- I already knew her through her CDs and I like her music.
- I like who she is. She had hard times but she persevered and now shares the joyful and nostalgic music of her country. She’s like a benevolent grandmother.
- On the stage I liked the complicity of the musicians, their smile and the pleasure they had to play. Musicians who play without pleasure remove any pleasure from me.
- I liked the elements of mise-en-scene…The violin and the sax were dancing in the background. I see they worked on it, and I felt honoured they wanted to give us this in addition to the sole music.

What about you? What do you look for in a concert? What is there in a Concert that there is not in a CD? What makes a “good” concert”?

Let’s discuss this in the comments… :)

jeudi 5 novembre 2009

Clarinette Bis

(English version below)
Hier soir, c’est un clarinettiste qui est venu jouer. Il porte un nom formidable : Renato Mastrocola. Je trouve ce nom extraordinaire. Il impose tout de suite le respect que l’on doit à un musicien illustre parce qu’il a un nom italien. Ca sonne comme « Pavarotti ». On a envie de le déclamer avec une voix forte comme un présentateur à l’entrée de l’artiste, et il est forcément accueilli avec un tonnerre d’applaudissement.

Renato fait partie de cette équipe de jeunes formidables de mon église qui m’ont apporté un soutien sans faille à chaque fois que j’ai fait appel à eux. Et comme les autres il s’est mit sous la Cabane où il a travaillé, sué, lutté et recommencé pour attraper mes notes impossibles. Quand je lui disais « c’est bon, ça devrait aller » et il me répondait toujours : « Non ! Ce n’est pas encore bon ! Encore une prise ! » Et il avait raison, cette prise supplémentaire était toujours un petit miracle, à chaque fois la meilleure.

A la fin de la soirée, j’avais un instrument de plus sur le CD. Il reste encore beaucoup de travail, mais chaque étape nous rapproche du but, et c'était un honneur d'avoir pu enregistrer quelqu'un du nom de Renato Mastrocola.

Last night, a Clarinet came to play. He has an awesome name: Renato Mastrocola. I find this name extraordinary. When you hear this name, you suddenly pay to this person the respect due to a famous artist because he has an Italian name. It rings like “Pavarotti”. It makes me feel like shouting it loud like a frontman just before the artist enters, and his coming provokes a thousands applauses.

Renato belongs to this wonderful team of youth of my church who always supported me whenever I called them. Like the others, he sat in the Shelter and he worked, sweated, and struggled to catch my impossible notes. When I would tell him :“It’s ok, this should be fine”, he would always answer: “No! It is not yet fine, record me again!” And he was right, this last additional take was always a little miracle because it was the best one.

At the end of the recording, I could say I had an additional instrument on the CD. There is still quite some work to do. But each recording brings me closer to the goal, and it was another step accomplished yesterday.

lundi 2 novembre 2009

Strasbourg

Dans les belles rues de Strasbourg... // In the beautiful streets of Strasbourg...

Après un week-end bien occupé, c’est lundi soir, et ma maison avait bien besoin de se retrouver un peu. J’ai donc invité Norah Jones pendant que je faisais le ménage. Un p’tit coup de téléphone, et Norah frappait à la porte. Elle s’est installée au piano, et sa voix chaude a rempli mon appart de douceur et de calme.

“When I look in your eyes
I can feel the butterflies
I love you when you're blue…”

C’est un miracle quotidien qui était inconnu il y a à peine un siècle…pouvoir inviter un musicien chez soi à toute heure de la journée, avec juste un CD.

J’ai maintenant une salle de bain toute propre et un appart prêt à accueillir les musiciens (en chair et en instruments ceux-là) qui vont recommencer à défiler à la maison.

Cette soirée tranquille est bienvenue après un gros week-end. Avec la B.O. nous étions à Strasbourg pour un concert à l’occasion de la Fête des Protestants 2009. Le défi était de taille : la moitié des musiciens jouait déjà le matin dans un autre groupe tandis que l’autre moitié (dont j’étais) devait faire l’allez retour sur Strasbourg dans la journée avec un concert au milieu, et seulement deux heures pour s’installer et faire les balances.

Tout au stress de la préparation, nous étions réunis dans une petite arrière salle des locaux de l’Armée du Salut quand le « Major » (c’est comme ça qu’ils appellent le responsable) nous expliqua qu’à ce même endroit, le matin même, il avait nourri une femme et ses six enfants qui dormaient dans la rue depuix 4 jours. C’est le quotidien de cette église qui se dédie à soulager et aider ceux qui sont en difficulté…La misère n’a pas de frontières. Je ne me sentais pas bien fier.

Avec les kilomètres que nous avions dans le dos et la fatigue dans yeux, ça n’a pas été notre meilleur concert. Mais c’est toujours formidable de voir comment certains y trouvent tout de même leur compte et viennent nous le dire ! Malgré nos fausses notes. La beauté est dans les yeux de celui qui regarde...

Ah, je m’excuse, Norah doit partir, je vais la raccompagner à la porte. Bonne nuit…

Près du canal à Strasbourg // Beside the channel in Strasbourg

After a busy week-end, it’s Monday night and my house needed some cleaning. So I invited Norah Jones at home while I was tidying my flat. Just a phone call and Norah was knocking at my door. She sat at the piano, and her warm voice started filling my apartment with a sweet calm.

“When I look in your eyes
I can feel the butterflies
I love you when you’re blue…”

It is a daily miracle that people did not even know hardly a century ago…being able to invite a musician at home anytime, with only a CD.

I now dispose of a clean bathroom and the apartment is ready to welcome the (real) musicians who are going to come and record soon.

This calm night is good after this busy week-end. With the B.O. we were in Strasbourg for a concert. The challenge was pretty big: half of the band played in another band in the morning while the other half (whom I was part of) had to go to Strasbourg, perform the concert and come back in the same day. And we only had two hours to set up the P.A. system.

Juste before the concert, we were quite nervous when we gathered in a small room of this Army of Salvation church. Then the “major” (I don’t know the word for their pastor in English) told us that this morning, in that very room, he had fed a woman with her 6 children who had slept in the street for 4 days. This church daily feeds homeless and poor people... Poverty knows no frontiers. I felt really small.

With the kilometres and the fatigue, this concert was not our best one. But it is always amazing to see how some people manage to find things they like and come to us to tell it! Despite our wrong notes. Beauty is in the eyes of the one who looks.

Oh, sorry, Norah has to go, I must show her the way to the door. Good night…